Interview suite à la campagne TV et Web de prévention des violences éducatives ordinaires

Interview suite à la campagne TV et Web de prévention des violences éducatives ordinaires

Mai 2011

Brigitte Oriol

Que pensez-vous de la campagne lancée cette semaine contre « les violences éducatives » ?

Grâce aux récentes découvertes scientifiques, il est prouvé maintenant qu’il est dangereux d’utiliser des moyens violents qui font peur aux enfants dans le but de les éduquer à l’obéissance et de les discipliner. Ces découvertes doivent atteindre tous les gens, les foyers familiaux, la société toute entière et cela de toutes les manières qui soient, elles ne peuvent pas rester enfermées dans des livres ou confinées chez des experts. Quand il s’agit de prévenir la population pour les alerter des dangers du Sida, de la violence conjugale, de la rougeole par exemple, il est nécessaire de faire une campagne. La violence éducative est un fléau qu’il est urgent de traiter parce qu’il fait des dégâts sur la société toute entière.

La vidéo peut paraître un peu « choc » pour certains, pensez-vous que cela était nécessaire pour faire passer le message ?

Ce qui est très choquant c’est de voir un enfant se faire gifler et personne pour le défendre ou avoir de la compassion pour sa douleur et son humiliation. Le message fort de la vidéo c’est de voir la grand-mère prendre sa fille dans ses bras pour lui susurrer pardon au creux de l’oreille. En tant que témoin de la scène violente de sa propre fille, elle réalise qu’elle lui a transmis le “virus” de la violence. C’est exactement ça qu’il faut retenir de ce message, la seule “leçon” que l’on donne à l’enfant quand on le gifle, le fesse, le brutalise, l’insulte, c’est de lui apprendre la violence.

On entend souvent les parents, voire certaines personnes publiques parler de « bonnes fessées » à des fins éducatives. Qu’en pensez-vous ?

La quasi totalité des gens est favorable à donner “des bonnes fessées” et c’est normal puisque nous sommes la quasi totalité de la population mondiale à avoir reçu des fessées.
Ca montre bien qu’en frappant nos enfants, nous apprenons aussi à l’adolescent et l’adulte qu’il va devenir, à frapper, tout en lui faisant croire un énorme mensonge comme: “c’est pour ton bien que je fais ça”. Alors qu’en vérité la seule raison des coups ou des punitions qu’ils subissent est due au fait que leurs parents, eux aussi, ont subi et appris la violence très tôt sans la remettre en cause et que c’est pour cette raison qu’ils battent leurs enfants sans penser leur faire du mal.

Quelles sont ou peuvent être les conséquences (physiques et psychologiques) sur l’enfant d’une telle gifle, d’une claque ou d’une fessée ?

Les conséquences sont multiples. Pour ne pas souffrir des fessées, des gifles, des menaces, des moqueries, des insultes, l’enfant est obligé de se blinder en se coupant de ce qu’il ressent, de ses émotions et c’est ainsi qu’il va en même temps endommager gravement sa capacité d’empathie. Nous pouvons le vérifier en voyant la réaction à cette campagne, on continue à soutenir l’éducation à “la bonne fessée” et on ne peut pas avoir de la compassion pour l’enfant meurtri par la gifle. Les émotions dont l’enfant est obligé de se couper, trouvent malgré tout à s’exprimer plus tard et souvent de manière très violente contre des plus faibles et des innocents ou contre lui-même par la toxicomanie, l’alcoolisme, la dépression, l’automutilation, le suicide et la liste est longue. La majorité des gens pensent encore que cette jeunesse n’a pas reçu assez de “coups de pieds au cul” et que c’est pour cette raison qu’ils sont violents et agressifs. Il est devenu urgent d’informer les parents que l’éducation par la crainte, la fessée, la négligence, la démission fabriquent des individus perturbés avec des sentiments pervertis.

Une loi est-elle nécessaire ?

La loi proposée par Edwige Antier est absolument nécessaire, elle est là pour rappeler que l’enfant est “une espèce” à protéger très sérieusement. Elle est prévue avant tout pour INFORMER les parents des conséquences des mauvais traitements sur le cerveau comme la gifle, la fessée, l’indifférence, le mépris et aider les parents à faire autrement que par des actes qu’ils ne veulent pas ou n’aiment pas pratiquer pour la plupart d’entres eux. Nous devons sortir de l’ignorance pour construire un monde sans violence.