Résoudre les séquelles causées par la maltraitance infantile

par Alice Miller

Résoudre les séquelles causées par la maltraitance infantile
Friday 01 September 2006

Depuis la parution du livre “Le drame de l’enfant doué” en 1979, je reçois régulièrement des lettres de lecteurs me racontant leur histoire et me posant beaucoup de questions s’y rapportant. Je ressentais souvent le besoin de réagir face à ces récits de vie très émouvants et regrette beaucoup de n’avoir pas pu répondre à ce besoin par manque de temps. J’avais le désir de communiquer à d’autres personnes ces témoignages importants, ces récits de victimes de maltraitance des enfants, mais je n’avais pas le droit de le faire, car les textes en question n’étaient adressés qu’à moi en toute confidentialité.

Mi-2005 seulement, j’ai eu l’idée d’ouvrir une boîte à lettre sur mon site Internet afin d’y publier ces lettres et mes réponses avec l’autorisation des auteurs. Ces lettres parlent de souffrances souvent inimaginables endurées pendant l’enfance des personnes adultes, qui malgré des années de thérapie n’ont jamais même réalisé qu’elles ont été maltraitées. Elles souffraient de nombreuses maladies, se culpabilisaient pour tout ce qu’on leur avait fait subir et c’est seulement à la lecture de mes livres qu’elles se sont données la permission de ressentir pour la première fois les souffrances de leur enfance. Certaines personnes ont trouvé la clef qui leur a permis de comprendre toute leur vie et par la même, la porte de sortie de leurs peurs paniques, leurs dépressions et leurs addictions.

Bien sûr, maintenant ces personnes se posent beaucoup de questions, qu’elles ont évité de se poser jusqu’à là. Mes réponses à ces questions visent à se repérer dans cette nouvelle situation et de trouver des personnes, témoins compréhensifs et conscients, capables de les soutenir dans cette démarche afin d’utiliser la connaissance acquise de manière optimale.

Ainsi, les personnes maltraitées jadis trouvent un lieu où s’exprimer librement et où trouver ensemble des moyens de se libérer des suites tragiques des maltraitances subies.

Nous ne pouvons régler les problèmes liés aux maltraitances par des thérapies évitant les faits, et ne se limitant qu’aux fantasmes. Mais nous pouvons nous libérer des suites de ces traumatismes, si nous sommes prêts à nous confronter émotionnellement avec la vérité de notre enfance, abandonner le déni de notre souffrance, développer l’empathie pour l’enfant que nous étions et ainsi comprendre les raisons de nos peurs. C’est ainsi que nous pouvons nous libérer du poids des angoisses et des sentiments de culpabilité dont on a chargé nos épaules depuis nos plus jeunes années. Grâce à la découverte de notre histoire et de nos sentiments, nous apprenons à connaître la personne que nous sommes, et apprenons à lui donner ce dont elle a besoin impérativement, mais qu’elle n’a jamais reçu de la part des parents: l’amour et le respect. C’est le but même de la thérapie : les blessures peuvent guérir si elles sont prises au sérieux et pansées, cependant, l’existence des cicatrices ne doit pas être niée.

Ce qui n’était qu’une hypothèse lorsque j’ai écrit “Libre de Savoir” et “Notre corps ne ment jamais” se trouve confirmé pleinement par les lettres des lecteurs. Souffrir des conséquences des blessures de l’âme n’est pas seulement limité à un groupe restreint de personnes, mais touche la majorité des habitants de cette planète. Mais seul un petit nombre veut le savoir, car la peur devant l’impuissance, jadis, de l’enfant battu, les empêche d’en prendre connaissance. Car je pars de l’hypothèse que nous tous, à très peu d’exceptions près, étions battus au cours de notre enfance, la plupart du temps très tôt (suivant en cela les conseils de la pédagogie noire cf. “C’est pour ton bien” ). Un enfant battu s’attend à être puni pour toutes les manifestations de mécontentement et surtout la colère. Cette peur peut rester inconsciente (car son origine n’a jamais été assimilée, ni même découverte) mais elle peut agir très activement accompagnant la personne toute sa vie et déterminer tout son comportement.

Ci-après, je cite ma réponse du 2.8.2006 à la question d’une lectrice, à savoir ce que je veux dire par la notion de “Thérapie”, qui s’est avéré être efficace pour moi comme pour d’autres.

Une thérapie efficace doit aider les patients à prendre conscience de l’histoire douloureuse refoulée de son enfance grâce à l’éveil de ses émotions et de ses rêves, afin qu’ils n’aient plus à craindre les dangers qui les ont menacés REELLEMENT au cours de l’enfance, mais qui, aujourd’hui, NE LES MENACENT PLUS. Les patients n’ont alors plus besoin de craindre et de répéter inconsciemment ce qui leur est arrivé à l’âge le plus tendre, puisqu’ils en ont pris connaissance, et, en présence du thérapeute, témoin lucide, ils peuvent réagir avec des émotions fortes. Alors seulement, ils cessent de se traiter eux-mêmes cruellement, ils arrêtent de s’accuser ou de se nuire par des dépendances de toute sorte, car à ce moment là, ils ont pu développer l’empathie pour l’enfant qui a souffert gravement du comportement des parents. Si des dangers devaient se manifester plus tard dans leur vie d’adultes, ils seront mieux armés pour leur faire face, car ils sont maintenant plus capables de comprendre leurs vieilles peurs et de les relativiser.

Cette façon de procéder est en nette opposition par rapport à toutes les formes de traitement dans lesquels il s’agit d’adopter un comportement nouveau, ou bien celles consistant à améliorer le bien-être (par la pratique du yoga, la méditation, la pensée positive, etc…). Dans toutes ces pratiques le sujet de l’enfance n’est jamais abordé. La peur d’aborder ce sujet est présente dans toute la société et elle est facile à constater. Elle est basée sur la peur des enfants jadis battus, la peur des punitions, s’ils leur prenait l’audace de réaliser la cruauté des parents. Si cette peur est si répandue, c’est parce que la plupart des personnes ont dû grandir sous les coups, ceci sans avoir le droit de se défendre.

Cette même peur apparaît aussi dans la psychanalyse qui élude jusqu’à présent les problèmes de maltraitance au cours de l’enfance. Les théories des psychanalystes sont échafaudées, dès le départ, sur cette peur des parents. En conséquence, analysés comme analystes se trouvent ainsi prisonniers, parfois pendant des dizaines d’années, d’un labyrinthe de concepts. Les analysés souffrent de sentiments de culpabilité récurrents car ils pensent avoir rendu la vie difficile à leur parent. Ces mêmes analysés ignorent souvent qu’ils ont été des enfants gravement maltraités car ILS NE DOIVENT PAS L’APPRENDRE. La possibilité pour le thérapeute d’amener à comprendre cet état de fait dépend de la connaissance de sa propre vie depuis ses premières années. Afin de solutionner ces problèmes, j’ai dressé une liste FAQ, pour orienter ceux qui cherchent de l’aide dans ce domaine, et les éclairer sur ce qui les attend, ceci avant qu’ils ne s’engagent dans cette voie.
Alice Miller.

Muriel Salmona
Alice Miller
Thomas Gruner
Olivier Maurel
Jean Claude Snyders
Robert Maggiori
Eric de Bellefroid
Jacques Trémintin
Zaida M. Hall
J.-F. Grief