Comment je peux aider mes parents

Comment je peux aider mes parents
Saturday 26 April 2008

Chère Madame Miller,

je suis une femme de 46 ans,gravement malade depuis des années ,et je suis suivie entre autres par une médecin compétente,ouverte et chaleureuse qui,de même que vos ouvrages qu’elle m’a recommandés ,m’a aidé à voir la triste réalité en face au sujet de mes parents.Elle est le témoin éclairé dont vous parlez toujours.
Sans elle,sans vous ,je ne serais plus en vie depuis longtemps .
Sans votre lucidité et votre courage ,sans le courage de ma médecin d’avoir affronté ses propres parents et vu clair dans son enfance,et aussi en réalisant ma responsabilité dans le désarroi de mes filles,qui étaient devenues suicidaires à l’adolescence,l’une par anorexie et l’autre en dépression profonde,je n’aurais jamais osé me remettre en question ,ni remettre en question les méthodes culpabilisatrices et incohérentes de ma mère,ni l’autoritarisme maladif de mon père.Ils sont toujours en vie tous les deux et continuaient à exercer du chantage affectif et des pressions morales sur mes enfants,sur mon mari et sur moi jusqu’à il y a deux ans,date à laquelle j’ai entrepris de rompre totalement les relations nuisibles avec eux.Ma mère me harcèle encore
occasionnellement dans des lettres auxquelles je ne réponds pas et j’ai déménagé plus loin de chez eux,dans la même ville toutefois.
Sans soutien, j’aurais continué à ne pas me rendre compte de ce que j’infligeais depuis leur naissance ,à mes filles âgées de 17ans aujourd’hui et dont la santé mentale s’améliore doucement.
Ma question a un rapport avec la culpabilité et la névrose obsessionnelle de nettoyage,de peur des microbes,dont souffre mon père(descendant arménien de rescapés du génocide) dont il est prisonnier.Je sais qu’il ne faut pas inverser les relations père-fille,mais je me demande s’il est possible de l’aider à sortir de cet enfermement par l’aide d’une tierce personne,voire un médecin.Ma mère et lui ont des problèmes psychiques et vivent cela discrètement, en une sorte de folie à deux avec très peu de contact avec l’extérieur et énormément de méfiance envers tout.Etre enfant chez eux équivalait à mener une vie d’enfermement
psychologique comme une kidnappée ou comme dans une secte.
Ayant découvert sa maladie,je souffre de culpabilité,car je suis seule avec ce secret de sa maladie qu’il camouflait sous le nom de”précautions”,”raison”…et j’ai de la peine de savoir que nous sommes séparés à jamais à cause de cela.
En fait,je ne peux guérir moralement,car je suis tenaillée par des images de ce père qui souffre et en même temps,de ce père qui s’est toujours imposé tyranniquement,de ce père pour lequel j’étais trop “bavarde”,pour lequel je faisais toujours trop de bruit,trop de taches etc…
Si jamais ,chère Madame,vous aviez un petit onseil,je vous en serais très reconnaissante, Merci pour tout ce que vous faites pour diminuer la Souffrance,du fond du coeur,merci,

AM: Si vous avez lu mes livres vous devez connaître ma réponse: On ne peut pas soigner son père de son obsession, surtout un père qui vous a terrorisé pendant votre enfance. Avec cette illusion vous trahissez la petite fille que vous étiez, et c’est aussi vos enfants qui devront payer pour cette illusion. Vous aussi, bien sûr.

Réponse de Brigitte:

Quand on connaît les tortures qu’ont vécues les arméniens pendant le génocide on a plutôt envie de les plaindre, de les protéger, de les aider et surtout de ne pas leur en rajouter. Ceci est valable pour tous ceux qui ont subi et souffert des horreurs de la guerre, des prises d’otages, des attentats…..
Leur position de victime fait que ce sont des personnes intouchables contre qui on ne peut pas être enragé puisqu’ils ils ont déjà tellement souffert et c’est là le piège parce que dans cette attitude ils vous ont laissé croire que vous n’aviez pas d’autre choix que de rester vous aussi victime de leur malheur et de leur propre souffrance.
C’est certainement la raison qui vous pousse si fortement à vouloir sauver vos parents aujourd’hui avec l’espoir que vous pourrez vous sauver vous aussi de cette prison. Hélas ce n’est qu’une illusion parce que vos parents on déjà fait le choix de rester dans le déni de leur douloureux passé en s’emprisonnant dans la maladie et en s’étant vengés sur une petite fille innocente que vous étiez.
Vous n’êtes pas responsable du malheur qu’ont subi vos parents, vous êtes victime qu’ils n’aient pas pris soin de leur souffrance et vous n’êtes pas non plus responsable de leur bonheur. Par contre vous avez la liberté de vous sortir de cet enfermement pour goûter à la vie et au bonheur. Bien à vous Brigitte