Minimiser la maltraitance

Minimiser la maltraitance
Monday 15 October 2007

Bonjour,

J’ai découvert votre livre (paru en 2004) seulement il y a quelques jours. J’avais jusqu’alors lu les écrits de M. Ruffo, O. Maurel mais je n’avais encore jamais lu un livre d’Alice Miller.

Mon malaise général depuis plusieurs années a amené ma curiosité à découvrir le monde des écrits sur la pédospsychiatrie, la psychothérapie…et je suis contente, même très très contente d’avoir découvert Alice Miller à travers son dernier livre.

Je ne me suis jamais autant retouvée dans une lecture…c’est incroyable…inimaginable à tel point que cela fait même peur car mon éducation et mon histoire pourraient me faire croire que ces “retrouvailles” avec moi-même correspondent à une adhésion inacceptable et “communautaire”. Comme quoi, la découverte de soi peut nous amener des doutes, des peurs mais je pense que le combat en vaut la chandelle.

J’ai dû aller à l’hôpital il y a un an car je n’en pouvais plus de tout et de rien…bien sûr, le prétexte du chômage, de mes trois enfants, de la fatigue ont aidé mon entourage à expliquer ma chute libre…heureusemet je partage mon mal être avec mon mari et j’ai trouvé une thérapeute géniale (la même que dans le livre : elle s’appelle “Suzanne” aussi).

Je n’ai pas été une “enfant battue” au sens propre du terme (enfin tel qu’on le dit dans notre société) ; j’ai, néanmoins, reçu des gifles, des fessées et on a bénéficé du traitement du martinet à la mode dans les années 70 !

Ce que dit Alice Miller explique bcp de choses sur mon mal être. J’ai eu peur de ma mère toute ma vie (je suis contente car je dit “j’ai eu peur” et je ne dis plus “j’ai peur”, comme quoi ma thérapie m’a déjà bcp aidé en un an !). Avoir peur de sa mère c’est inadmissible, inacceptable, insupportable…C’est lorsque je me suis rendue compte que mes enfants avaient peur de moi que je me suis réveillée.

Elles ont 10 ans 1/2, 6 ans 1/2 et 5 ans et j’ai déjà “abîmé” mon aînée mais ma psy me dit que ce n’est pas trop tard et qu’à 10 ans je peux encore modifier mes relations avec elle ; et c’est vrai…

Quant aux petites, elles auront eu leurs premières années un peu bousculées, mais je vois déjà la différence depuis que je suis une psychothérapie.

Toute ma vie, je n’ai pas pu, pas su dire mes émotions, mes ressentis, mes avis (et pourtant j’étais une enfant joyeuse, gaie, “grande gueule” qui aimait se faire remarquer et faire la fête…comme quoi, il faut se méfier des apparences). Dans ma famille, les enfants doivent fidélité, reconnaissance, politesse, respect aux parents et aux vieux.

Ma mère s’est SACRIFIEE pour nous, elle nous l’a dit toute notre vie et nous le dit encore. Quel horreur ce mot SACRIFIEE !! Quel sens de l’amour ! Elle-même ayant souffert toute sa vie pour de “très bonnes raisons” (pension pendant 10 ans…etc) n’a pas su (alors qu’elle croyait bien faire) ne pas reproduire le schéma de sa mère pour qui l’éducation est une question d’obéissance et de reconnaissance.

Bref, tout ça pour dire, que j’ai coupé les ponts pendant un an et cela fait un bien fou même si ça fait souffrir (de toute façon, cela m’a moins fait souffrir que de les voir). Maintenant la mère de ma mère est morte et je revois ma mère dans des circonstances différentes car elle est triste et moi je vais mieux…je suis contente…je continue ma thérapie.

Je voulais lancer un message d’espoir car tout est possible lorsqu’on veut aller mieux. Pour moi, mes enfants ont été un moteur dans la recherche de mon bien-être car je n’allais pas bien et elles n’allaient pas bien (ou si elles allaient bien maintenant elles n’auraient pas été bien plus tard). L’élément déclencheur a été peut-être mon licenciement alors tant mieux d’avoir été licencié car du travail, on peut toujours en trouver alors qu’une vie on en a qu’une ! Il faut aussi savoir dire “non” à sa famille et savoir s’éloigner. On n’est pas obligés d’aimer sa famille car ce sont des personnes qui nous sont imposées et le jour où j’ai compris cela, j’étais en voie de guérison.

Peu de gens comprennent car finalement, on est tous dans le même moule alors si certaines personnes comprennent il faut les garder car les relations ne sont vraies que si les gens vous parlent “vrai”.

J’ai envie de VRAI, de vrai regard et non pas de regard fuyant ; j’ai envie d’utiliser les bons mots et pas des banalités et des mots qui veulent rien dire…j’ai soif d’empathie, de calme et de sérennité.

J’ai eu une chance inouie de trouver une thérapeute qui ne m’impose pas des lois affectives, qui ne m’oblige pas à aimer, à remercier, à dire des choses sans en avoir envie. Les seules limites que je m’impose, ce sont les miennes et j’en ai acquis pas mal dans ma vie (maintenant j’en fais le tri).

Merci à Alice Miller (je vais acheter ses autres livres) et j’espère que mon témoignage pourra aider d’autres personnes en détresse.

Il est dommage que tous les psy ne soient pas comme la mienne ; je ne pensais pas que ce métier contenait autant de professionnels inefficaces et peut-être dangereux..comme dans tous les métiers d’ailleurs !

Encore merci à Alice Miller ; je me sens libre et apaisée.

Une rescapée de la maltraitance psychique !
AM: Vous écrivez: “Je n’ai pas été une “enfant battue” au sens propre du terme (enfin tel qu’on le dit dans notre société); j’ai, néanmoins, reçu des gifles, des fessées et on a bénéficié du traitement du martinet à la mode dans les années 70 !” Et cela ne suffit pas pour SAVOIR que l’on a été mal-traitée?

Réponse de Brigitte:

Peut être que dans sa période de tristesse votre mère vous semble moins dangereuse et plus vulnérable ce qui vous permet certainement de vous en rapprocher maintenant. C’est dans cette “pseudo réconciliation” que l’ex-enfant que vous étiez ne se laissera pas duper, car lui n’a pas oublié la douleur des coups brutaux que vous avez reçus. En écoutant vraiment votre corps et en observant vos comportements avec vos enfants, vous saurez s’il est juste pour vous de continuer à fréquenter votre mère ou si c’est un sentiment de culpabilité qui vous force à le faire. BO