Honnêteté

Honnêteté
Saturday 21 February 2009

Bonjour,

Dans ma famille, mon père a accaparé ma mère par ses sollicitations et demandes d’attention incessantes, et ce jusqu’à sa mort. Je me suis trouvé ainsi dans mon enfance privée de ma mère car elle était indisponible aussi bien physiquement, que psychologiquement et affectivement. Même absent, mon père était présent dans les agissements de ma mère qui se répercutaient sur nous les enfants. Un peu comme dans une secte dont les adeptes suivent les préceptes du gourou à la lettre, alors que celui-ci se trouve quelquefois à des milliers de km d’eux. Ma mère a été ainsi sous son emprise totale toute sa vie. Bien que malheureuse, elle n’a jamais réussi à le quitter.
Je pense que ma mère a trouvé une compensation dans ce fonctionnement car elle-même n’avait connu son père que jusqu’à 4 ans, celui-ci étant parti faire la guerre. Il ne pu tenir sa promesse de revenir car 2 ans plus tard il fut tué lors d’un combat.
L’inversion des places ou l’épouse devient la mère de son mari et le mari le père mais aussi l’enfant de sa femme m’a fortement déstabilisée. D’autant plus que ma grand-mère maternelle n’aimait pas ma mère et l’avait délaissée pour aller vivre d’autres amours sous d’autres cieux . De ce fait, mon rôle a été aussi d’être la mère de ma mère, d’entendre ses confidences et son désarroi et de la consoler lorsque mon père macho et violent la faisait souffrir.
Cependant, nous aussi les enfants souffrions des accès de rage quasi quotidien de notre père qui faisait la pluie et le beau temps. Nous étions terrorisés et personne pour nous protéger.
Ma mère ne me voulait pas mais n’a pas pu avorter car mon père s’y est opposé par principes religieux. Elle me maltraitait car elle ne m’aimait pas. J’ai mis longtemps à l’admettre car j’avais pitié d’elle mais surtout j’étais terrorrisée. Elle ne s’est jamais remis en question et n’a jamais manifesté le moindre regret de ses actes contrairement à mon père qui culpabilisait toujours après avoir été violent. J’ai pris ça pour de l’amour. Que pouvais-je faire d’autre ? Et lui donc ?
Un jour qu’il avait envie de parler, il m’a raconté la guerre. Il avait assisté (à environ 10-12 ans) à des tirs par les allemands sur des nourrissons lancés préalablement en l’air.
Comment enfant gérer cela sachant que son propre père le réveillait à coups de ceinturons à 4 heures du matin afin qu’il aille travailler aux champs.
Pourtant pendant des années alors qu’il était marié, il a envoyé de l’argent à ses parents. Il se sentait tout le temps coupable.
Son frère non. On m’a dit qu’ il avait été un jour si fortement battu, qu’il avait faillit devenir fou. Il a alors quitté la maison. Il est mort d’un cancer alors qu’il n’avait pas 60 ans.

J’ai reproduit le schéma de confusion des rôles avec mon mari qui était totalement indifférent à moi et à ses enfants. Cependant n’ayant pas eu de mère, je l’avais placé dans ce rôle. Je croyais que je devais le protéger. Moi-même serait “le père” idéalisé et protecteur de la famille qui ne ferait pas subir à mes enfants ce que mes parents nous avait fait endurer. Je n’avais rien trouver de mieux pour m’en sortir et avoir enfin la famille dont je rêvais, que d’épouser un homme faible et insensible.

Aujourd’hui j’ai 49 ans. Je vis seule (mais pas malheureuse)et ai compris beaucoup de choses sur mon histoire, en partie grâce à l’étude de vos livres que je réouvre régulièrement.
Je sais que rien n’est gagné et que je dois être à mon écoute car hier encore, je me suis surprise à ne pas pouvoir répondre à une question de ma mère par peur de sa réaction. Ce n’est que lorsque j’ai raccroché le téléphone que je m’en suis aperçu. Je m’en suis d’abord voulu mais j’ai été indulgente avec moi-même car j’ai des circonstances atténuantes. Je me suis tellement haï pendant des années, me jugeant responsable et coupable de tout, n’osant pas m’affirmer et encaissant les coups, que je ne veux plus être mon ennemie et lui donner ainsi raison. Je suis quelqu’un de bien.
Réponse de Brigitte :

Oui, vous êtes quelqu’un de bien parce que vous avez osé regarder en face la tragédie de votre enfance terrorisée par des parents sans vergogne. Le fait d’avoir encore peur de votre mère qui a souhaité votre mort avant même que vous naissiez à la vie est légitime. Il reste encore les stigmates de cette tentative de destruction que vous avez forcément ressentie puisqu’elle a continué par la suite à vous traiter SANS PITIE et sans amour. Quand vous en serez convaincue, vous n’aurez plus de scrupule à répondre à ses questions quelques soient ses réactions. Bravo pour votre honnêteté à vous-même. BO