Où sont les limites du supportable?
Tuesday 25 March 2008
bonsoir,
je me permets de vous faire parvenir mon histoire suite à la lecture de vos ouvrages-notamment l’avenir du drame de l’enfant doué et le corps ne ment jamais… Voilà maintenant 16ans -j’en ai aujourd’hui 32- que je souffre d’anorexie mentale, anxiété, tocs et dépression, ces derniers étant apparus bien en amont de l’anorexie. Cette histoire est sans doute banale, je ne sais pas… Dans mes plus lointains souvenirs, j’ai toujours eu le sentiment de ne pas vivre comme tout le monde, mais dans un monde à part, en quelque sorte un monde autistique dans lequel solitude et isolement régnaient en maître. Les seuls mots dont je me souvienne sont ceux de ma mère qui déclarait avoir voulu faire un petit frère à ma sœur aînée mais qu’elle ne voulait pas de deuxième enfant car elle avait entendu dire qu’il déclarait les problèmes de santé de la mère, en l’occurrence eczéma et asthme. Alors voilà, dés le départ, je décevais non seulement en naissant, en naissant fille, et en ayant de l’eczéma. De même de mes plus lointains, je ne me rappelle que de la haine, du mépris, de l’indifférence entre mes parents que je n’ai jamais vus affectueux l’un envers l’autre ou s’embrassant…jamais…Dés le départ, j’ai eu le sentiment de ne pas être née du désir de ma mère et mon père mais de la haine qu’il existait entre eux…alors comment pouvait-on être aimable dans de telles conditions ? Dés le départ, j’ai eu le sentiment d’avoir à réparer le malheur que je lisais dans les yeux de ma mère, cette tristesse dont je me sentais responsable puisque je l’avais déçue encore plus que j’en tenais responsable mon père de ne pas rendre heureuse sa femme… C’était donc là mon rôle, le pourquoi de ma vie : rendre à ma mère son sourire. En outre, j’étais persuadée d’avoir à lui payer la dette du fait d’avoir développé un eczéma quand je sentais la violence qu’il se dégageait des soins qu’elle me donnait quotidiennement. Plus tard, ma scolarité n’a pas amélioré les choses car du fait de l’apparence de ma peau(mains et visage étaient recouverts d’eczéma), je me sentais rejetée des autres et pour éviter d’avoir à subir leur rejet, je m’isolais de moi-même…au moins, avais-je le sentiment de maîtriser le danger que représentait l’autre susceptible de me rappeler mon apparence. Mais à ma mère je ne voulais pas le montrer donc je m’inventais une multitude d’amis, une vie que je rêvais le soir en m’endormant et l’illusion marchait visiblement…j’allais mal mais ma mère ne voulait/pouvait pas le voir…la relation entre mes parents me pesait de plus en plus…je rêvais que mon père meurt pour que ma mère puisse refaire sa vie…Par la suite ma mère a voulu soigner mon eczéma par la médecine douce, pour éviter qu’il ne se transforme en asthme : ce qui est fatal si j’étais mise sous cortisone…j’ai donc vu tous les médecins les plus farfelus de la région et j’ai été très marquée par certains : entre granule de sang et urine de ma mère, piqûre de gaz dans l’anus, surveillance de mes sels, restrictions alimentaires à chaque fois qu’on voyait un médecin différent et puis ma mère a fini par vouloir que je mange bio, ce à quoi je me suis opposée…mais comme j’étais chez elle, je n’avais pas le choix, je restais donc des heures devant mon assiette, ou pire j’avalais les aliments tout rond pour ne pas en avoir le goût en bouche…et puis quand ma mère partait travailler, je mangeais les aliments qu’elle achetait pour mon père car lui ne mangeait pas bio ou alors je mangeais les gâteaux apéritifs réservés aux invités…j’ai commencé à prendre du poids j’ai atteint 80kg pour 1m71…j’étais de plus en plus mal dans ma peau, pas d’amies, pas d’amis, mis à part ceux que je m’inventais pour ne pas décevoir ma mère…mais en prenant du poids je risquais de ressembler à mon père et donc de perdre l’amour de ma mère…donc je me suis mise à vouloir perdre du poids…c’est là que s’est mise en place l’anorexie mais je crois qu’elle n’est que la suite logique de toute mon histoire…et que les troubles alimentaires ont commencé bien avant…l’anorexie a été diagnostiquée en 1992, je ne savais pas ce que c’était j’ai très vite chuté…j’ai très peu de souvenir de cette période, si ce n’est une courte hospit et le divorce de mes parents qui m’a soulagé…je refusais de voir mon père pendant 7ans…ensuite le temps s’est arrêté, j’ai chuté très bas puis j’ignore comment sans doute pour ne pas faire de mal à ma mère j’ai repris du poids j’ai donné l’illusion d’aller mieux mais je fuyais dans l’hyperactivité physique(4h de sport intensif par jour) et intellectuelle(j’ai un dea de psycho..) et puis un jour j’ai rechuté en 2003,j’étais très mal avec mon ex ami de l’époque…retourner à l’hôpital a été la solution pour lui échapper…et depuis j’enchaîne les séjours à l’hôpital, certes j’avance un peu plus à chaque fois mais j’en suis là au 10eme suite à un arrêt cardiaque…je suis sortie en novembre un poids faible mais presque à un imc de 18.5…j’allais mieux même si accepter mon corps était difficile et puis j’ai trouvé un emploi, je me sentais bien je commençais à aller mieux et puis mon contrat s’est terminé et la ça a été la chute infernale aujourd’hui j’ai reperdu 7 kg je suis lasse de me battre, de lutter, de faire des efforts, j’ai l’impression que rien ne paie, rien n’a de sens et je recherche surtout une thérapie qui pourra m’aider à me libérer des fantômes du passé qui hante tous mes souvenirs actuellement…j’ai l’impression d’avoir fait le tour au niveau parole, je comprends très bien mon histoire je sais pourquoi j’en suis arrivée là, ça ne pouvait être autrement de toutes façons…mais aujourd’hui, j’en ai assez de cette maladie qui grâce à une excellente hospit avec le pr rigaud de dijon, j’ai pu me détacher et faire la part des choses entre la maladie et le fait d’être malade…je suis malade mais je ne suis pas l’anorexie comme je le croyais…c’est pourquoi je suis aujourd’hui fermement décidée à m’en sortir mais je ne sais plus à qui m’adresser c’est pourquoi après avoir été interpellée par la lecture de vos ouvrages, l’impression de m’y retrouver, je me permets de vous envoyer ce mail et de vous demander un avis, vos conseils…si vous le voulez bien, bien entendu….je vous laisse l’adresse de mon blog si vous le souhaitez il y a d’autres informations me concernant…
bien à vous
je vous remercie d’avoir pris le temps de me lire…
Réponse de Brigitte:
Vous écrivez dans votre blog: “merci du fond du coeur à toi ma petite maman qui souffre et à qui j’aimerais tellemnent pouvoir dire : “t’en fais tout va bien”…je veux y parvenir un jour c’est un de mes désirs qui me tient le plus au coeur…je t’ai fait et te fais tant souffrir malgré tout l’amour que j’ai pour toi…merci de perséverer à mes côtés et malgré nos conflits de toujours croire en moi…”
Malheureusement votre histoire est loin d’être banale, il est même très courant que les anorexiques se sentent coupables de faire souffrir leurs parents par leur maladie, alors que ce sont eux qui les ont conduit dans cet enfer par leurs mauvais traitements.
Tant que vous resterez dans le piège de l’hypocrisie en voulant séduire “votre petite maman” qui n’a eu de cesse que de vous tyranniser par ces actes sadiques, vous resterez éloignée de vos VRAIS sentiments qui vous maintiendront dans vos souffrances. BO