Vivre sur un leurre

Vivre sur un leurre
Saturday 22 April 2006

Bonjour,
Je vous envoie ce bref témoignage sur la complexité des familles.
Lorsque j’étais enfant, j’ai subi des abus sexuels de la part d’un oncle. Je me suis tue pendant des années, pensant que si mon père venait un jour à le savoir, la famille serait brisée. Le pardon, j’en ai jamais voulu, j’ai toujours vécu avec une certaine colère qui m’a d’ailleurs servi à réaliser plusieurs choses dans ma vie. Il y a quelques années, suite à la naissance de ma nièce, je me suis dit qu’il fallait en parler à mes parents (j’ai toujours soupçonné ma mère d’être au courant), dans un but de protection de ce nouveau membre de la famille. Le résultat a été tel que je me l’étais imaginé: une rupture familiale. Mon père s’est mit à refuser de voir mon oncle et ma tante qui me traitaient de menteuse. Il y a environ un mois, j’ai appris tout à fait par hasard, que les liens familiaux s’étaient ressoudés, la famille s’est même unie pour l’anniversaire de ma soeur auquel je n’ai pas été invitée. Aujourd’hui, je me rends compte que je ne fais plus partie de cette famille, j’en suis quasiment bannie et que personne ne protégera ma nièce de cet homme. Cette histoire me donne la nausée. Je ne suis plus en colère contre une seule personne mais contre toute une famille et si la colère continue à alimenter ma créativité, l’avenir risque d’être riche en événements.
Bien à vous.

AM: Oui, espérons que la colère ne vous quittera pas trop vite parce que – vous avez raison – elle va sans doute alimenter votre créativité et vous libérer des liens destrusteurs.

Réponse de Brigitte.

Votre témoignage est tellement typique, beaucoup de personnes victimes d’abus sexuel dans l’enfance disent ne pas en avoir parlé aux parents par crainte de briser la famille toute entière en révélant cette vérité.
Mais n’importe quel enfant respecté et protégé par ses parents ose leur en parler parce qu’il n’a aucune crainte d’être rejeté ou condamné et qu’il sait tout à fait que ses parents ne le laisseront pas tomber et qu’ils feront le nécessaire pour ne plus l’exposer au danger.

Peut être sentiez-vous jadis que vous ne seriez pas cru et pas protégé, tout comme votre nièce, parce que c’est ce qui se passe aujourd’hui dans votre famille, en se réunissant tous à la même table, abuseur et parent.
Cette réalité est terrible et probablement que vos émotions de colère et de dégoût vous permettront d’accepter qu’effectivement vous ne faites pas partie de leur monde.

Bonne continuation, Brigitte