Je fais mon devoir

Je fais mon devoir
Wednesday 14 January 2009

Bonjour,

Vous dites souvent en réponse aux lettres que l’on peut adulte refuser de continuer à subir ce que l’on vivait enfant.
Moi je sais cela intellectuellement. J’ai été conditionnée depuis ma naissance à exister pour servir ma mère et mon père dans toute leur cruauté et leur manque d’amour à mon égard. Je ne sais même pas qui je suis.
Lorsque je mange, est ce parce que c’est l’heure et qu’on m’a appris à respecter cela ou bien est-ce parce que j’ai faim. Et pour tout c’est pareil. Je ne me connais pas moi-même et je me sens dissociée. Je suis une étrangère pour moi. Lorsqu’une situation me fait peur, il s’installe un blanc, une anesthésie et je ne ressens plus rien et je n’ai même pas un avis puisque je ne ressens pas ce qui se passe. Je suis conditionnée tel un chien au réflexe de Pavlov. Et comment guérir d’un réflexe. Cela va si vite.
J’ai vu un psy quelquefois mais je n’aimais pas son manque d’humanité et de compassion et ses histoires de fantasme. De toute façon je ne fais confiance à personne .
Quand je regarde autour de moi je ne vois que cruauté, méchanceté, médisance de la part des gens. Ce monde est très difficile à vivre, c’est pourquoi je préfère rester seule car les gens s’utilisent entre eux, mais il n’y a pas d’amour. Je me préserve.
Mon père est mort depuis peu. Je ne l’idéalise pas et lorsque je l’ai vu mort je me suis permise de lui dire ma colère et la souffrance qu’il nous a fait subir à mes frères et moi.
Auprès de ma mère j’accomplis mon devoir car elle est vieille et à force d’être soumise et de prendre des médicaments, elle ne comprends pas ses papiers. Si elle se plaint de sa triste vie pour me manipuler comme elle sait bien le faire, je lui réponds qu’elle n’a jamais été affectueuse et que ce n’est pas parce que mon père la maltraitait, qu’elle devait nous maltraiter à son tour et faire de moi surtout, son souffre douleur. Elle dit que je reviens toujours sur le passé mais je réponds que cela fait 40 ans qu’elle me parle de son passé sans considérer ce que j’ai pu ressentir. Et la discussion s’arrête là.
Je ne suis pas amer mais la seule chose que je puisse faire aujourd’hui est de ne pas reproduire. J’aimerai me retrouver mais comment faire. Mon cerveau a mis en place des protections et même si elles n’ont plus lieu d’être, je pense que seul le temps peut aider à cela.
Merci pour vos recherches et votre courage.

Réponse de Brigitte:

Votre lettre est tellement vraie et pleine de bon sens, je trouve au contraire que vous savez qui vous êtes. Vous êtes une ex-enfant martelée et conditionnée à l’obéissance par des parents qui vous ont dépossédée de tous vos sentiments et toutes vos émotions qui représentaient votre vie. C’est plutôt rare de connaître aussi bien que vous les raisons de votre impuissance d’aujourd’hui. Vous viviez dans un réel danger d’exister, d’ailleurs vous ne vous êtes autorisée la colère seulement devant la dépouille de votre père quand vous étiez sûre qu’il ne pourrait plus vous faire mal. Malheureusement vous reproduisez l’attitude de vos parents sur vous-même en restant figée dans la peur dans laquelle ils vous ont enfermée. En renonçant à “votre devoir” auprès de votre mère vous pouvez sans doute récupérer la liberté qu’elle vous a volée depuis longtemps. Peut être trouverez-vous un peu d’énergie pour entrevoir cette possibilité POUR VOUS. BO