Lucide

Lucide
Monday 27 July 2009

Chère Alice et chère Brigitte,

j’aimerais réagir au posting « Je t’en veux, je t’aime « .
Personnellement, ayant été une enfant battue, maltraitée et humiliée par mes parents, tous les livres d’Isabelle Filliozat et surtout ceux d’Alice Miller m’ont énormément aidée pour voir la vérité et aller à la rencontre de cette petite fille en souffrance.
Je dis surtout d’Alice Miller, car j’avais besoin d’entendre qu’on avait le DROIT de ne pas aimer ses parents, que j’avais le droit de les détester et même de les haïr et que cette haine et cette rage envers mes géniteurs est tout à fait légitime . Que je n’étais pas ingrate, méchante pour autant, mais que c’est juste le résultat de toutes ces années vécues dans la terreur semées par deux adultes violents, hystériques, sarcastiques, manipulateurs et hypocrites .

Au début , quand j’ai vu le titre  » Je t’en veux, je t’aime « , livre d’Isabelle Filliozat, je ne voulais pas le lire, le titre me mettait mal à l’aise, parce que moi, mes parents  » Je leur en veux, je ne les aime pas pour autant ! »
Je l’ai quand même lu, mais avec la crainte que l’on me demande de pardonner à tout prix, car je sais que Isabelle F. encourage les gens à essayer de se reconcilier avec ses parents une fois les blessures suffisamment guéries. A la fin de la lecture j’étais quand même soulagée , car elle dit que des fois ce n’est pas possible et aussi que la reconciliation n’est pas un but en soi, le plus important étant de guérir ses anciennes blessures.
Je pense qu’elle sous-estime largement le nombre de cas où la reconciliation n’est pas possible( voire pas souhaitable), parce que cela nécessite du côté des parents la volonté de changer, le courage de se remettre en question, la capacité d’empathie et de reconnaître les douleurs et souffrances de son enfant et d’en prendre l »entière responsabilité et du coup, supporter aussi ses propres douleurs d’ancien enfant.
( Et du côté de l’enfant l’envie de réparer le lien !!)

Processus bien difficile mais pas impossible à mon avis.
Je pense que ce penchant pour la reconciliation d’Isabelle F. s’explique par son parcours personnel. Elle a, apparemment, des parents suffisamment ouverts, conscients et respectueux qui ont su écouter ses colères et reconnaître ses souffrances d’ancien enfant.
Tant mieux pour elle . Je suis ravie qu’elle ait pu réparer les liens avec ses parents.

Mais je pense que c’est assez rare mais pas impossible .
En tout cas, ayant essayé de parler avec mes parents de mon enfance, ce fut un échec total. Ils désirent tout simplement ne ps en parler …C’est douloureux mais c’est comme ça. Mes parents ne m’ont jamais respectée ni aimée et ne me respecteront ni m’aimeront jamais.

Après avoir été déçue par plusieurs thérapeutes, mais aujourdh’ui sûre de ce que je veux et ce que je ne veux plus, j’ai trouvé une thérapeute formée par Isabelle F.
Elle ne minimise jamais mes souffrances et approuve entièrement ma décision d’avoir coupé les liens avec mes parents.Elle dit que je dois faire confiance à mes sensations et mes émotions, écouter mon corps et que c’est à moi de sentir et décider si j’ai envie ou pas de recontacter ( un jour ) mes parents ( NON NON NON !!!!!Je n’ai pas envie !!!!)….et que le plus important ce n’est pas le lien avec mes parents mais de s’occuper et de se préoccuper de la petite fille terrorisée et en souffrance, de la rassurer, la protéger, la comprendre, l’écouter ………
Moi, ça me va et je sûre et certaine que même morts je n’ai pas envie de revoir ces gens violents, hypocrites et méprisants ….. et si quelqu’un veux me faire croire le contraire, je suis prête à l’envoyer au diable ou ailleurs, car je ne souhaite plus jamais trahir cette petite fille de jadis.

Avec tous mes remerciements,
Réponse de Brigitte :

Bravo pour votre détermination.

Ce n’est pas nécessaire, en effet de changer du côté du parent, ni qu’il se remette en question ou qu’il se découvre une empathie pour la souffrance qu’il a faite endurer à son enfant. Tant mieux s’il a le courage d’y parvenir mais ça ne sera pas dans un but de s’approprier à nouveau sa progéniture, mais au contraire d’accepter qu’elle ne souhaite plus avoir de lien avec celui qui a endommagé sa vie. Il ne sert PLUS A RIEN à l’enfant de jadis qui est DEVENU ADULTE de combler ses besoins qui lui ETAIENT INDISPENSABLES alors, chez ses parents d’aujourd’hui. Lui seul peut combler ces carences en donnant toute l’empathie, la compréhension et le respect à cet enfant de jadis en ne l’obligeant plus à trahir ses vrais sentiments « en tournant la page » comme on a l’habitude de l’entendre. La réconciliation dessert l’ex enfant blessé qui sera obligé de se nier à nouveau pour donner une place nouvelle à son parent et c’est exactement cela qui provoque les symptômes et maladies en tous genres. BO